La redondance dans un cahier des charges
Tentative de définition
Dans un cahier des charges, la redondance peut prendre deux formes :
- Une phrase ou un paragraphe qui se répète exactement ou dont plus de 80% du contenu est identique à un(e) autre.
- Un message exprimé d’au moins deux façons différentes dans un même document.
Exemples de redondance dans un cahier des charges
Afin de se familiariser avec le concept de « redondance », commençons par l’illustrer à l’aide de quelques exemples réels.
Exemple 1 : redondance au sein d’une phrase
« Un établissement possède différents types de services ou de particularités appelés caractéristiques. Un établissement peut avoir aucune ou plusieurs caractéristiques. »
Dans cet exemple, le fait qu’un établissement puisse avoir plusieurs caractéristiques est répété une fois dans chaque phrase. Par conséquent, c’est une redondance.
Exemple 2 : redondance entre deux paragraphes
« Les ressources telles que les images peuvent ne pas être caractérisées par une langue. Par conséquent : une ressource est caractérisée par aucune à plusieurs langues et, inversement, une langue caractérise aucune à plusieurs ressources.
Par exemple, une ressource de type image peut ne pas être caractérisée par une langue. En revanche, les ressources telles que textes et liens peuvent être affichés en Anglais. »
Ici, on répète trois fois que certaines ressources, une image par exemple, peuvent ne pas être associées à une langue. Donc, c’est une autre forme de redondance entre un besoin exprimé (la fonctionnalité) et son texte explicatif qui n’apporte aucune valeur ajoutée.
Exemple 3 : redondance entre un schéma et son explicatif
Ici, le texte explicatif est redondant avec le tableau. Il n’apporte aucune information nouvelle.
Problèmes liés à la redondance dans un cahier des charges
Problèmes causés au lecteur du cahier des charges
Sur-effort à devoir lire plusieurs fois la même chose
En phase de rédaction, il faudrait garder à l’esprit que le lecteur est pressé. Il a peu de temps à consacrer à notre travail et est surchargé de documents à traiter (email, comptes-rendus de réunion, notes de service, livrables des autres projets, etc.). De plus, la documentation technique (cahier des charges, spécifications détaillées) peut rebuter. En général, il n’est pas impatient de s’y plonger.
Par conséquent, soyons empathique envers le lecteur afin de ne pas lui faire perdre du temps (et profondément l’agacer) à devoir lire plusieurs fois la même chose. Il vous en sera reconnaissant ! Il s’agit donc d’aller à l’essentiel, en expliquant les choses clairement une fois et à un seul endroit.
Ambiguïtés causées par des divergences ou des incohérences entre deux formulations
A chaque fois que nous exprimons un même message à des endroits différents, nous prenons les risques suivants :
- Introduction de nouvelles informations, potentiellement contradictoires ou divergentes avec les précédentes.
- Oubli ou retrait d’informations structurantes.
- Modification du vocabulaire précédemment utilisé.
Autant de biais qui parasitent la lecture et complexifient la compréhension du cahier des charges.
Problèmes causés au rédacteur du cahier des charges
Effort à maintenir la cohérence
Plus un document contient de redondances plus il est difficile pour le rédacteur d’en maintenir la cohérence. En effet, dès lors qu’il faut modifier un message qui a été répété, ce n’est pas une modification à effectuer mais deux, trois, voire plus. Cela peut paraître encore gérable si c’est un seul message qui est répété, mais en sera-t-il de même s’il y en a cinq ? Pensera-t-on réellement à tous les impacts ? Cela est peu probable. Ainsi, plus le document grossira plus la probabilité d’oubli sera forte, cela étant valable quel que soit le support (Word, PowerPoint, Jira, Confluence, etc.)
De plus, passé un certain seuil, le travail de restructuration du document devient pharaonique. Ainsi, il pourrait entraîner un important dépassement de charge si l’on vous demandait de le réorganiser.
Indicateurs de productivité faussés
Plus on se répète, plus cela nécessite d’effort de rédaction, plus on produit de pages ou de tickets. Mais c’est une production faussée, qui n’a aucune valeur ajoutée autre qu’augmenter le nombre de caractères. Dit différemment, si notre livrable était un steak et qu’il perdait un tiers de sa masse en évaporation d’eau lorsqu’on le dépose dans la poêle chaude, alors le consommateur du dit steak se sentirait lésé. A juste titre.
Perte de temps et d’énergie
En nous répétant, nous perdons du temps en phase de rédaction. Mais, surtout, nous faisons également perdre du temps au lecteur en phase de validation. Forcément, si l’on écrit plus, il y a plus à parcourir, le temps de validation étant d’autant rallongé. Le lecteur moyen lisant 200 à 300 mots par minute, moins il y aura de mots, plus il gagnera du temps, ce dont il vous sera reconnaissant.
Vous pouvez tester votre vitesse de lecture ici : http://www.readingsoft.com/fr/test.html
Comment ne plus faire de redondance ?
Il n’y a pas de recette miracle pour ne plus faire de redondance. Il faut donc admettre que l’on en générera toujours et s’armer en conséquence pour les détecter.
Nous pourrions distinguer deux types de redondance : la générale et la locale, la première étant transverse à un document et la deuxième propre à un chapitre, une page, un paragraphe, voire une phrase.
Concernant la générale, une technique efficace consiste à avoir toujours une table des matières suffisamment détaillée, avec des titres explicites, et à travailler avec l’onglet de navigation ouvert (ctrl+F) sur la rubrique « Titres ».
En effet, avoir constamment sous les yeux la structure chapitrale force, à chaque fois que nous avons besoin d’ajouter un élément, à se demander si le sujet n’a pas déjà été traité. Ainsi, le risque d’être redondant s’amenuise puisque la structure même du document pousse au rassemblement des idées. A l’inverse, moins la table des matières sera détaillée et organisée, plus le risque d’être redondant et de faire de la dispersion thématique sera élevé.
Cela signifie donc que :
- La table des matières devrait être travaillée au fil de l’eau, de façon à ce qu’elle reflète exactement le contenu du livrable à l’instant « t ».
- Les inputs devraient être intégrés un à un de façon ordonnée, en se demandant à chaque fois dans quel « tiroir » ils vont (est-ce un objectif ? un défaut ? une fonction ? une définition d’un concept métier ? etc.) et si ce tiroir existe déjà ou non.
Concernant les redondances locales, le meilleur remède que nous connaissons reste encore une relecture serrée du document, à minima personnelle et si possible par un tiers, en étant concentré sur ce travers-là de rédaction.
Quand peut-on être redondant ?
Nous pourrions dire « jamais » mais chaque règle souffre ses exceptions. En effet, on peut accepter la redondance, locale comme globale, pour des raisons pédagogiques : la répétition volontaire d’un message afin de favoriser son appropriation et sa mémorisation, ou encore pour expliquer de différentes façons un point particulièrement complexe afin d’aider le lecteur à bien le comprendre.
Par exemple : « Les coefficients techniques médicaux viennent s’appliquer si un risque médical est identifié sur un des bénéficiaires du contrat. Ils sont possibles uniquement sur les formules proposant un questionnaire médical préalable à la souscription du contrat et on dit alors qu’il y a sélection médicale, le ou les risques médicaux étant identifiés sur le contrat par un code appelé clause médicale.
Dit différemment, si le client souscrit une formule incluant la sélection médicale (questionnaire) et qu’un bénéficiaire subit un sinistre couvert par la clause médicale (liste des risques médicaux portés au contrat selon une codification) alors les coefficients techniques médicaux s’appliquent. »
Le second paragraphe est certes redondant avec le premier, mais il permet de clarifier le propos en expliquant sous un autre angle un sujet complexe, en l’occurrence l’application des coefficients techniques médicaux.
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